Alors que le collectif PLT, formé d’artistes du label Planetarium Records, ne s’est formé qu’en 2018, les 5 Coréens du groupe se sont déjà lancés dans la conquête du marché européen, en annonçant pour 2019 une tournée européenne, passée par Paris le 13 février dernier.
Organisé par MyMusicTaste, que l’on connaît notamment pour les shows K-Pop mais un peu moins pour les artistes aux genres alternatifs, ce concert ne s’est pas joué à guichets fermés mais près de 400 fans se sont tout de même réunis pour cet événement exceptionnel. Les prix de ce concert allaient de 49€ à 85€, offrant ainsi la possibilité aux fans de choisir la catégorie qu’ils souhaitaient. Notez qu’en dernière minute, environ une semaine avant le Jour J, un petit fanmeeting avec une séance de questions-réponses de 20 minutes a été annoncé, un prix faramineux de 200€ à ajouter au prix initial du billet pour rencontrer les 5 artistes, un tarif véritablement disproportionné et qui avait vite fait réagir sur les réseaux sociaux en amont du show.
Le jour du concert de PLT à Paris enfin arrivé, le Bataclan a éteint ses lumières sur les coups de 19h pour le démarrage tant attendu de la soirée. Malgré un tiers de salle difficilement rempli, une petite ambiance s’est vite installée parmi les fans présents en fosse, et les quelques uns aux balcons de la salle.
Et c’est donc le chanteur June qui a ouvert les festivités avec “The way you feel inside” et un petit R&B posé, de quoi démarrer cette soirée en douceur. Quelques petits soucis de réglages ont cependant un peu entaché le début de sa performance, avec un micro pas assez fort pour camoufler les cris des fans des premiers rangs – alors que rappelons la salle était loin d’être pleine -, et des instruments en fond un peu trop absent, notamment une guitare électrique qui s’est perdue dans l’ensemble.
C’est après cette première chanson que l’artiste a pris la parole :
“Bonjour Paris. Je m’appelle June. La chanson que vous venez d’entendre est ‘The way you feel inside’. J’ai recomposé la chanson d’une autre manière que la version originale, qu’est-ce que vous en pensez ? Je t’aime ! Je t’aime Paris ! [acclamations du public]
Merci beaucoup ! Les prochaines chansons sont ‘Autumn Leaves’ et ‘Gas Station’. Je suis tellement nerveux là, mais comme vous allez m’encourager, je vais essayer de faire de mon mieux !”
Et ce sont sur ces bonnes paroles que June a repris le show avec “Autumn Leaves“, titre originellement interprété avec CHEEZE. Pour cette chanson encore plus douce que la précédente, avec en prime une petite ambiance blues, June a choisi de chanter sur un tabouret, accentuant la mise en place d’une atmosphère intimiste au sein du Bataclan. Il a poursuivi comme promis avec la chanson beaucoup plus punchy “Gas Station“, pendant laquelle l’artiste a commencé à prendre de l’assurance face à son public parisien. Avec un flow plus soutenu, June en a même profité pour faire lever les mains des fans, et le public s’est immédiatement exécuté, très réceptif.
C’est ainsi que June a conclu son set personnel pour faire place au plus grand vocaliste de la formation, Gaho, qui est entré en scène en commençant par la chanson “Going“. A l’instar de son compère passé en premier sur scène, Gaho a adressé quelques mots à son public :
“Bonsoir, je suis Gaho. J’ai fais un bon vol pour venir vous voir. En tout cas, je me dis que j’ai bien fait d’inclure cette chanson dans la setlist quand je vous vois tous chanter en chœur. J’ai fais cette chanson pour qu’on s’amuse tous ensemble, et c’est réussi. Est-ce que vous connaissez ‘Shine on you’ ? Je l’ai remixé pour qu’on s’amuse tous ensemble, alors j’espère que vous allez répéter après moi ! J’ai un ami qui va jouer au piano pour cette chanson.”
Comme c’est le cas dans la version studio de “Shine on you“, c’est donc Villain qui a fait apparition sur scène pour se produire aux côtés de Gaho, dans une ambiance douce piano/voix, qui a permis aux artistes de faire état de leurs émotions du moment. Villain a aussi confirmé qu’il maîtrisait parfaitement son instrument.
Gaho a présenté son morceau le plus connu, “Stay Here”, en commentant :
“Je vais enchaîner avec la prochaine chanson.”
Bien évidemment, tous attendaient avec impatience ce morceau, qui en a ému plus d’un, et dès les premiers accords de piano, les fans ont vivement acclamé le chanteur. Entre sensibilité et mélancolie, le moment était magique pour beaucoup et le Bataclan a été englouti dans une atmosphère assez puissante. Les fans accompagnaient sur le refrain Gaho, qui a été l’un de ceux à s’être le plus affirmé sur scène cette soirée-là. Sa voix, d’une délicatesse sans nom, a peut-être offert le plus beau moment du concert. Avec beaucoup de pudeur, le jeune homme s’est retiré pour laisser sa place à Jung Jin Woo, qui s’est présenté comme “la troisième personne du soir” [rires].
Jin Woo s’est fait assez discret pendant le concert, au plus grand regret de certains. Toutefois, il a su nous épater avec “Satellite”, un morceau très épuré. La salle a été plongée dans un silence religieux pendant quelques minutes avant que quelques fans ne lui hurlent des déclarations d’amour, ce qui n’a pas manqué de lui arracher un petit sourire. À la fin de cette performance, Jin Woo a humblement remercié les fans. Seul avec son micro, le chanteur a su réchauffer les coeurs en annonçant qu’ils avaient “préparé beaucoup de chansons à montrer”. Le collectif éprouvait vraiment le désir de communiquer avec ses fans et de leur faire plaisir.
Changement d’ambiance avec deux morceaux plus rythmés, assez bluesy pour “Problems” et plus pop pour “She’s got everything”. Jin Woo a alors prouvé qu’il était capable de s’adapter à tous types de sons, en gardant sa vibe habituelle ; deux chansons qui ne peuvent que plaire aux fans qui apprécient les morceaux tendant davantage vers la pop. La voix de Jin Woo, l’arrangement musical maîtrisé à l’arrière et le charisme de l’artiste ne peuvent qu’en faire une formule qui fonctionne bien !
Le passage de Jin Woo fut assez bref, et c’est peut-être l’une des choses qui aurait pu être mieux pensée pour parfaire le concert : cette impression que les performances des artistes s’enchaînaient un peu mécaniquement et que certains passages du show étaient de toute évidence plus marquants que d’autres, balayant alors certains membres du collectif pour les laisser dans l’ombre.
Moti est alors monté sur scène pour interpréter “Humble”. Le rappeur a immédiatement enflammé la salle avec son rap et ce refrain en anglais chanté en choeur par les fans. L’énergie aurait pu être encore plus intense mais Moti a préféré se rapprocher des fans, prendre des photos et échanger avec eux. Il a donc redonné du rythme au concert, étant donné que l’ambiance installée par Jin Woo était plus intimiste, plus lounge, plus bluesy. C’est d’ailleurs cette diversité qui a été particulièrement appréciée : chaque artiste a son propre style, et tous se complètent. La variété des genres musicaux a donc donné une toute autre allure au concert.
Moti s’est par la suite exprimé :
“Bonjour Paris, je t’aime ! Je m’appelle Moti. La chanson que je viens de chanter fait partie de l’album sorti hier. Vous l’avez écouté ? Qui connaît le titre de cette chanson ? Merci !”
En effet, Moti venait tout juste de sortir un album la veille, avec pour titre principal “Go” sur lequel il a fait équipe avec June, et qu’il a bien évidemment interprété après “Blue”.
“Blue” a permis de dessiner encore plus précisément l’univers de Moti, principalement influencé par un rap rythmé et puissant. Les lumières bleues ont d’ailleurs illuminé la salle. Moti recherchait vraiment la complicité avec ses fans. Immédiatement après la performance, les fans ont repris cet hymne de tous les concerts en France, et que les artistes apprécient d’entendre.
Le moment suivant était assez plaisant. June a rejoint Moti sur “Go”, qui est donc le titre principal de son nouvel opus. Les fans chantaient en choeur avec les artistes tandis que le parquet de la salle tremblait sous leurs sauts en cadence.
Qui dit collectif de Planetarium Records, dit aussi nécessairement artistes qui se démarquent des autres. Et qui de mieux pour incarner cet esprit de différence que Villain, ce jeune artiste au style très américain, à l’attrait pour le R&B dans ce qu’il a de plus traditionnel. Le compositeur aux vibes et au grain de voix si particuliers a entamé ses performances avec “Fairy”, une chanson où il a pu faire état de son goût pour les influences américaines. Composée par ses propres mains, d’ailleurs recouvertes de gants qu’il ne quitte sous aucun prétexte, la chanson incarne l’univers propre de l’artiste. Même si il ne s’agit pas du morceau le plus intéressant musicalement parlant, celui d’après, “Rescue Squad”, rend aussi compte qu’il a un univers plus unique que les autres, plus affirmé. Et alors qu’il semble habituellement introverti et timide sur scène, Villain s’est lors de cette soirée le plus mis en avant. Peut-être que son habileté à parler en anglais l’a aussi rapproché de la scène occidentale, et a permis une communication sans filtre avec les fans présents. Il a d’ailleurs tenu à nous raconter son histoire, son expérience personnelle et les épreuves qu’il a surmontées et qui l’ont amené jusqu’ici :
“I love you! Mon ami m’a dit que c’était connu ici. Bonsoir Paris ! À l’agence, on nous a dit de ne choisir que trois chansons par personne à faire sur scène. [le public hue]. Mais moi j’ai décidé de couper deux chansons, et d’en faire quatre [ndlr : cela explique pourquoi les deux premières chansons de Villain ont été écourtées].
J’ai une chose à dire ! Vous connaissez ‘fucking reloaded’ ? [ndlr : son signe]. [Je vais vous expliquer] comment j’ai créé ce signe. Quand j’étais petit, j’ai vécu à Dubaï. Tous les gens de mon école étaient tous beaucoup plus riches que moi. Et moi comme je suis asiatique, ils étaient putain de racistes avec moi. J’avais peu d’amis, et la plupart [des enfants] étaient racistes envers moi. Mais un jour, ma mère m’a dit qu’à chaque fois que quelqu’un me disait ‘fuck you’, je devais leur rendre la pareille avec l’amour de Dieu.”
Le public l’attendait avec impatience, et la voilà, “Manitto”. Villain a fait vibrer la salle avec ce titre ultra-puissant, et l’audience a réagi avec ferveur : les personnes installées au balcon sont même descendues en fosse pour profiter de l’ambiance. Il faut dire que l’espace, loin d’être rempli, permettait de circuler totalement librement. “Manitto” est le titre le plus connu de Villain, celui qui a confirmé sa légitimité aux yeux des artistes indépendants coréens. Entre puissance vocale et maîtrise technique, rien de mieux que cette performance pour prouver que Villain a sûrement été le plus charismatique de la soirée. Dans un style différent, “Luhvin it” a prolongé l’ambiance, tandis que le refrain a été entraînant.
Place ensuite aux collaborations entre les différents artistes. Ce n’est à l’évidence pas ce qu’il manque dans le label, puisque tous ont déjà travaillé ensemble et continuent de le faire très régulièrement à l’heure actuelle. Et c’est “Dock” qui a inauguré cette série fabuleuse de collaborations. Le morceau a réuni Jin Woo et June, deux artistes qui se sont plutôt bien complétés. Ce moment a suscité quelques rires dans l’audience, qui pouvait voir June attendre sagement d’être invité sur scène.
Moti est ensuite entré sur scène, très vite rejoint par Villain pour se produire sur “FREE THE MIND”. Les garçons ont voulu assumer leur liberté et leur jeunesse avec une bouteille de soju, que Villain a très vite confisqué à Moti, après qu’il ait voulu la partager avec des fans, mineurs pour certains.
Le morceau a été présenté par Moti lors d’un petit discours qui s’est vite terminé en taquineries entre les deux garçons.
“La chanson que je viens de chanter avec Villain fait partie de l’album sorti hier, et que j’ai sorti avec Da Eun que je n’aime pas” [rires] [ndlr : Da Eun est la véritable prénom de Villain].”
Villain a invité June à monter sur scène pour le titre “Days”. Tous les trois assis sur des tabourets, la guitare acoustique a donné le ton. Des petits problèmes de rythme et de sons ont quelque peu perturbé la performance. Ce n’était d’ailleurs pas la première fois que Villain a été sujet à quelques coquilles, un sabotage dû aux pré-enregistrement vocaux diffusés en salle et totalement incompatibles avec un show rap. En bref, une performance intéressante mais pas transcendante pour autant.
Moti et June sont restés sur scène pour une chanson plus pop “Trip all day” : un beau moment de complicité avec les fans, qui ont eu droit à quelques gros plans des artistes sur leurs téléphones, empruntés par les artistes eux-même pour se filmer. Les fans se sont d’ailleurs beaucoup amusés sur ce morceau.
“Insomniac”, collaboration entre Jin Woo et Gaho, deux artistes aux voix distinctes, a commencé sur un faux départ, avec un problème technique qui a poussé les artistes à revoir le raccord son, en raison d’un dysfonctionnement du micro. Cela n’a pourtant pas empêché les deux garçons de s’amuser avec le public.
Gaho, l’un des favoris de la soirée, s’est ensuite exprimé :
“Jusque-là, les chansons parlaient de l’amour homme/femme, mais la prochaine chanson peut aussi parler de l’amour entre vous et nous. Ça parle des facettes de l’amour qu’on ne voit pas forcément, alors j’espère que vous allez d’apprécier !”
Et quelle chanson plus juste pour illustrer son propos que “Then”, sur laquelle il fait équipe avec Villain. “Then” incarne un style assez particulier, plus reggae, plus nuancé. La voix de Gaho a apporté de belles couleurs dans la salle.
Finalement, ces quelques collaborations ont permis de montrer que les artistes avaient le potentiel de mêler différents styles qui leur sont propres et de communiquer avec les fans, pour les emmener peu à peu dans leur univers. Un moment intéressant étant donné qu’il a apporté un peu de diversité au concert. On aurait peut-être préféré plus de dynamisme de la part des artistes, qui, relevons-le, ont tout de même un sacré potentiel !
Les cinq garçons sont tous remontés sur scène. Le concert approchant de sa fin, et les fans voulaient à tout prix voir le collectif dans son ensemble. Rappelons que même si les artistes sont indépendants, ils se retrouvent régulièrement sur des chansons, qui font évidemment leur renommée ! Si cette caractéristique de collectif fait leur force, elle en fait aussi leur faiblesse, et sur “Glue”, on a senti que le groupe n’avait pas l’habitude de l’organisation minutieuse que nécessite une performance de groupe, à l’instar d’un boysband par exemple. La performance aurait pu être meilleure, mais les garçons ont tout de même montré leur complicité entre eux et ont pu interagir avec l’audience.
Sur “Blah”, quelques problèmes techniques sont venus à nouveau déranger la performance, mais dans son ensemble, les garçons ont fini par prendre leurs aises et à tous trouver leur place sur scène. Gaho a fait des merveilles au chant et les fans ont dansé sur cette chanson à l’allure pop.
Dès que les premières notes de “Hocus Pocus” ont retenti, les fans se sont mis à les acclamer et à chanter en choeur. June a attrapé le drapeau de la France et s’est mis à le brandir. Les fans ont repris le rythme “Seven Nation Army” du groupe White Stripes, et les garçons ont demandé l’origine de ce chant tant apprécié des fans occidentaux. Et bien évidemment, les fans n’ont pas manqué de parler du sport favori des français, le football.
Eux-mêmes ont évoqué la victoire du PSG il y a peu. Pour la première fois, les fans ont chanté “Allez les bleus” et ont surpris les artistes, mais pas que, puisque c’était assez inattendu pour tout le monde.
Villain a finalement annoncé la dernière performance. Tous l’attendaient, et c’est bien sûr “IGOHOLIC” qui a mis un terme au concert. Une énergie folle a instantanément envahi le Bataclan et les artistes, qui ont arrosé les fans et qui n’ont pas cessé de sauter. Le concert s’est terminé en beauté avec ce morceau tant attendu.
En bref, le concert était vraiment très intéressant, puisqu’en plus de leur statut particulier de collectif, assez rare dans l’industrie musicale coréenne (notons-le !), les garçons ont un talent évident. Il aurait été préférable d’organiser le concert différemment, afin d’apprécier une certaine diversité et de permettre aux artistes de ne pas attendre un trop long moment avant de remonter sur scène. Le potentiel des artistes aurait pu être plus exploité, et certains ont été plus dynamiques, plus passionnés que d’autres. Toutefois, pour une première date en Europe, et pour un collectif, il faut les féliciter pour leur talent, leurs styles, leur musicalité et leur passion. Rien de mieux que les PLT pour profiter des nuances offertes par la musique coréenne actuelle !
Merci aux artistes du label Planetarium Records et à MyMusicTaste pour l’organisation du show !
Un merci tout particulier également à 247 Asian Media !
Setlist :
01. The way you feel inside (June)
02. Autumn leaves (June)
03. Gas Station (June)
04. Sérénade (June)
05. Going (Gaho)
06. Shine on you (Gaho Feat. Villain)
07. Stay here (Gaho)
08. Satellite (Jung Jin Woo)
09. Problems (Jung Jin Woo) (originellement interprétée avec Jeebanoff)
10. She’s got everything (Jung Jin Woo)
11. Humble (Moti)
12. Blue (Moti)
13. Go (Moti Feat. June)
14. Fairy (Villain)
15. Rescue Squad (Villain)
16. Manitto (Villain)
17. Luhvin It (Villain)
18. Dock (Jung Jin Woo Feat. June)
19. FREE THE MIND (Moti Feat. Villain)
20. Days (June X Moti X Villain)
21. Trip all day (June Feat. Moti)
22. Insomniac (Jung Jin Woo X Gaho)
23. Then (Gaho Feat. Villain)
24. Glue
25. Blah
26. Hocus pocus
27. IGOHOLIC